BraveRats: la bataille psychologique

2019, te voilà déjà ! Dix-huit disparaît, remplacé par dix-neuf. Avant toute chose, laissez-moi vous souhaitez à tous une excellente année, avec tous mes meilleurs vœux ! Pour marquer le coup, je voulais vous proposer un nouvel article. Après un réveillon fêté en grande pompe, j’ai toutefois préféré opter pour un article rapide et léger.

Mon choix se porte donc sur BraveRats, un excellent petit jeu de cartes exclusivement jouable à 2, et édité par Blue Orange. Cette boîte format mini est surtout l’occasion de vous glisser quelques mots sur les jeux minimalistes, dont les japonais sont de grands spécialistes, notamment bien représentés dans l’hexagone par l’auteur Seiji Kanai. Un concepteur de jeu que j’apprécie beaucoup, principalement connu pour son jeu Love Letter qui avait rencontré un joli petit succès il y a quelques années, et parfaitement représentatif du genre, mais aussi Chronicles ou bien encore, celui qui nous intéresse aujourd’hui.

Le jeu minimaliste peut se résumer en quelques points : un matériel des plus réduits (le plus souvent seulement quelques cartes), des actions très restreintes, pour des parties des plus rapides. BraveRats en est donc une parfaite illustration. son matériel se résume en tout et pour tout à 16 cartes, et son temps de jeu ne dépasse pas 5 minutes par partie. Son principe se résume en 5 mots : la bataille rencontre le shifumi (le pierre-papier-ciseau).

Disons le tout de suite : nous sommes face à un jeu parfaitement abstrait, dont la thématique de rivalité entre 2 clans de rats écossais ne sert qu’à doter les cartes d’amusantes illustrations. Et bien entendu à créer un petit jeu de mot avec son titre, que je vous laisse le soin de trouver par vous même. Venons donc en immédiatement à la règle.
Les cartes se répartissent en 2 decks de 8 parfaitement identiques entre chaque joueur. Celles-ci sont numérotées de 0 à 7, et possèdent par ailleurs un effet particulier. Un tour de jeu se fait exactement comme dans une partie de bataille ouverte : les joueurs choisissent une carte face cachée dans leur main, et la dévoile en même temps. On compare alors leur force respective pour savoir qui remporte la manche. À la fin de la partie, le joueur ayant remporté le plus de manche gagne. Simplissime ? Oui, mais non. En tout cas, clairement pas sans intérêt. Rappelez-vous, chaque carte possède un effet différent, et cette interaction entre la valeur et l’effet des 2 jouées à chaque manche constitue tout le sel tactique du jeu.
Par exemple, la carte 7- Le Prince, la plus forte du paquet, bat toutes les autres sauf la 0- Le Musicien qui annule la manche en cours, ou bien la 1- La Princesse, la carte la plus facile à battre donc, mais qui en contrepartie permet de remporter instantanément la partie si elle est jouée contre le Prince. Ou bien encore, le 3- L’Assassin est-elle aussi l’une des cartes plutôt faibles, met son effet permet de remporter la manche face à une carte plus forte.

Il apparaît donc très vite que le jeu demande en vérité plus de cogitation qu’il en a l’air de prime abord. Jouer une carte sans réfléchir aux conséquences mène rarement à la victoire. Nous sommes typiquement dans le cas d’un «mind game», ces jeux où plus que la stratégie à mettre en place dans l’absolu, ce qui compte est d’essayer de prévoir la façon dont jouera son adversaire pour le mener où l’on voudra, le bluffer, ou anticiper sa prochaine action pour le contrer ou au contraire le surprendre.
Ce qui marche parfaitement dans le cas présent, puisque, comme dans le fameux shifumi mentionné plus haut, les 2 adversaires sont pourvus exactement des mêmes armes, et peuvent donc savoir à chaque moment de la partie ce que l’autre possède encore en main ou non. Ce qui occasionne un certain rythme à chaque partie, puisque nous nous mettons sans nous en rendre compter à effectuer de petits calculs rapides pour évaluer quel est le meilleur coup à jouer selon le rapport prise de risque / gain, ce qui permet de nous guider dans notre choix :


« nous avons déjà joué telles cartes chacun, il nous reste donc celles-ci, ce qui signifie que pour la prochaine, s’il joue celle-là, je pourrais la contrer avec cette autre, ce qui me mettrait toutefois en mauvaise situation afin de remporter le duel face aux cartes suivantes ».



Pourtant, encore une fois, nous jouons avec un matériel des plus réduits. 8 cartes par joueur signifie donc 8 choix avant la fin d’une partie, ce qui ne prend que très peu de temps. Le jeu a donc ce côté très appréciable de « aller, encore une petite », permettant d’enchaîner aisément plusieurs parties d’affilé. Conséquence ? L’effet mind game s’en trouve d’autant plus renforcé, puisque nos choix se feront de plus en plus en fonction des parties précédentes et des actions de notre adversaire, pour essayer de ne pas installer une routine, et retourner ses armes contre lui.

À gauche, l’assassin rouge gagne son duel grâce à son pouvoir, à droite, l’assassin bleu échoue, car son pouvoir est annulé par celui du magicien rouge

BraveRats constitue donc un jeu diablement simple sur son principe, mais sournoisement efficace dans son fonctionnement. J’y vois donc un indispensable dans toute ludothèque qui se respecte, pour peu que l’on veuille posséder un jeu à 2 très court, transportable absolument partout, et que l’on pourra aisément apprendre à n’importe qui pour taper un peu le carton. Sans compter son prix tout doux, ce qui ne gâche rien. Ce n’est certes pas le jeu sur lequel on passera deux heures d’affilée, à moins de vouloir se donner des nœuds en enchaînant les manches, mais il a toutes les qualités requises pour constituer le jeu d’appoint indispensable quelques minutes entre deux autres activités.
Et si vous cherchez par la suite un jeu dans la même veine minimaliste, mais jouable jusqu’à 4 joueurs, je ne peux que vous conseiller de vous précipiter sur Love Letter, avec une préférence toute particulière dans sa version Kanai Edition, qui reprend les graphismes très particuliers, inspiré des estampes traditionnelles, de son édition japonaise originelle.

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