Il y a quelques jours, j’étais allé voir la comédie musicale We will rock you, ce qui m’avait permis d’écrire un article où je notais que le court passage de ce spectacle à Paris devait probablement surfer sur la sortie imminente d’un film présentant la vie de Freddie Mercury. Depuis, Bohemian Rhapsody est présent dans les salles, et je suis bien évidemment aller le voir.
Réalisé par Bryan Singer, principalement connu pour ses films de super héros ou le culte Usual Suspect, le biopic aura été le fruit d’une gestation compliquée, ayant changé 2 fois d’acteur principal pour cause de différent artistique avec les membres du groupe Queen avant que le rôle n’échoie enfin à Rami Malek, rendu célèbre pour son rôle dans la série Mr. Robot.
Côté scénario, nous suivons donc la vie de Freddie Mercury, jeune londonien fantasque passionné de rock et rêvant de gloire, de sa rencontre en 1970 avec les autres membres du groupe -Brian May (Gwilym Lee), Roger Taylor (Ben Hardy) et John Deacon (Joseph Mazzello)- qui se renommera rapidement Queen jusqu’à leur passage lors du mythique concert Live Aid en 1985.
En sortant de la projection, je savais que je voulais partager ici mon avis sur le film, cependant j’ai longtemps hésité avant de savoir quelle tournure donner à ma critique, partagé entre mon cœur et ma raison.
Je vais cependant commencer par une évidence : la performance de Rami Malek en tant que Freddie est incroyable. Difficile de se mettre dans la peau d’un personnage aussi charismatique et marquant que le chanteur, j’étais par ailleurs moi-même plus que dubitatif à la vue de la bande annonce. Force est de constater que l’acteur parvient à endosser le rôle avec brio. D’autant plus que celui-ci présente bien des facettes, le film n’occultant pas la part d’ombre du personnage.
Mention spéciale également à Gwilym Lee, dont la ressemblance avec Brian May est frappante, probablement bien aidé par inénarrable coiffure du fameux guitariste.
Pour en rester sur l’évocation des acteurs, on notera la présence de Mike Myers, jouant le rôle du producteur malavisé Ray Foster. Myers, qui avait joué une scène rendant un grand hommage à la chanson Bohemian Rhapsody en 1992 dans le cultissime Wayne’s World, devenu depuis une référence de la pop culture anglophone.
Pour en revenir à notre film, les membres restants du groupe se sont semble-t-il beaucoup investis dans ce projet, ce qui se voit à l’écran. Si Freddie est bel et bien le héros, il n’est pas pour autant glorifié comme l’unique responsable du succès de Queen. C’est bel et bien l’union des quatre membres qui leur a permis de donner naissance à autant de tubes aussi variés, chose que le film met à de nombreuses reprises en avant.
La manière la plus éclatante étant le parallèle entre sa première et sa dernière scène. De plus, si le film s’appelle Bohemian Rhapsody, ce n’est pas la seule chanson sur laquelle l’on s’attardera sur le processus créatif. Cependant, la folie créative dont faisait preuve le groupe donne lieu à de truculentes scènes, notamment lors de l’enregistrement de la chanson éponyme : on sent tout le plaisir du réalisateur à tourner ces passages.
De manière générale, tout amateur du groupe ne pourra que passer un excellent moment devant le film, grâce à leur musique omniprésente, et largement mise en avant. Je n’ai le souvenir que d’un seul hit de l’époque qui ne soit pas du groupe entendu lors d’une scène de fête, et ce afin de justifier le passage du groupe vers des sonorités plus disco pop au tournant des années 80.
En revanche, si j’ai pris énormément de plaisir pendant la première moitié du film, au bout d’un moment, ses ficelles narratives typiquement hollywoodiennes ont fini par me sauter aux yeux. Certes, il ne s’agit pas d’un documentaire. Cependant, certaines situations et mises en scènes s’avèrent trop revues, trop cliché pour ne pas être pointées du doigt.
Quand cela devient trop artificiel pour être vrai, difficile de rester totalement pris dans l’histoire. Ainsi, les personnages ayant eu une grande place dans la vie privée de Mercury ont un rôle trop souvent stéréotypé pour paraître vraisemblables. Ils ressemblent alors plus à des personnages de cinéma qu’à des personnages réelles.
Par ailleurs, je parlais plus haut des ficelles du film : sa construction suit un schéma parfaitement défini, bien entendu efficace narrativement parlant, mais que l’on connaît par cœur.
Difficile de faire ce film sans évoquer le destin tragique qu’a connu son héros. À ce niveau là heureusement, la chose est faite avec suffisamment de sobriété pour ne pas tomber dans un gros pathos totalement malaisant. L’on retiendra surtout une jolie scène entre Freddie et les autres membres du groupe, ainsi que toute la puissance évocatrice de la musique.
Car l’on en revient toujours à cette dernière, évidemment, comment pourrait-il en être autrement ? À ce titre, la longue scène finale de Bohemian Rhapsody est tout simplement éblouissante, un vrai plaisir cinématographique et musical à regarder et écouter. Et surtout une incroyable reconstitution d’un des évènements culturels les plus iconiques du XXème siècle, qui donne toujours autant de frissons plus de 30 ans après.
Alors finalement, conseillerais-je d’aller voir ce film ? Dans l’absolu, en tant que simple objet cinématographique, probablement pas. Mais pour peu que vous soyez amateur de ce groupe de rock mythique, oui, assurément, il y a peu de chance que vous en sortiez sans avoir pris une bonne dose de kif. Tout en gardant à l’esprit que le film prend de grandes libertés artistiques vis-à-vis de son personnage réel afin de magnifier son histoire.